Kitsch et marges

Mise à jour le   09/11/2022

Responsable :
L. Souquet

 

Jusqu’à présent, le travail que nous avons mené portait sur une définition du kitsch (1ère J.E.) et sur l’étude de cette notion à travers les âges (2e J.E. sur le Baroque, 3e J.E. sur l’Antiquité et 4e J.E. sur l’art contemporain). Après notre colloque sur « Kitsch et idéologies », programmé pour fin 2016, nous allons maintenant analyser le kitsch dans l’espace. Notre thématique générale pour le nouveau Plan, à partir de 2017, sera « Kitsch et marges ». Ce thème sera exploré selon deux lignes fortes, complémentaires et connexes : « Orient et Occident » et « Kitsch et objets ».

 

 

 

Cette sous-thématique vise une exploration des aires culturelles du kitsch, de l’Orient aux Amériques en passant par l’Europe. L’un des objectifs de cette approche sera l’analyse de la notion de kitsch ou de « mauvais goût » dans différentes cultures et régions du monde. La notion de kitsch est-elle opératoire dans des pays comme la Chine ou l’Inde, par exemple ? Pourquoi et comment les « chinoiseries » en vogue dans l’Europe des XVIIIe et XIXe siècles ont-elles été associées à la notion de kitsch ? On observe aussi un certain mépris des élites européennes pour le goût moyen-oriental ou pour la culture populaire nord-américaine : que révèlent ces jugements esthétiques ? Nous tenterons de décrypter les mécanismes socioculturels de jugement (Bourdieu, etc.) et de rejet du goût de « l’autre », souvent caractéristiques d’un positionnement hégémonique, voire européocentriste. Ces regards croisés seront étudiés selon différentes perspectives (histoire de l’art, sociologie, analyse littéraire, musicale ou filmique, etc.)

    • Une J.E. « Kitsch et Orient » permettra d’ouvrir les aires culturelles. Nos collègues Iside Costantini (spécialiste des relations entre la Grande-Bretagne et la Chine) et Yue Yue (sinologue) souhaitent s’investir dans ce projet. Nous nous interrogerons sur la validité de la notion de kitsch au Moyen-Orient et en Asie ainsi qu’aux représentations de l’Orient dans les cultures occidentales (arts plastiques, littérature, cinéma, etc.). Les travaux sur la caricature trouveront ici leur place (J.-C. Gardes).
    • Une J.E. « Kitsch et Amériques ». Cette Journée pourrait être organisée à Lorient (avec l’aide de M.-C. Michaud et en collaboration avec l’IDA). Les notions de carnaval et de carnavalisation pourraient être au cœur de cette approche.
    • « Le Kitsch dans les médias brésiliens ». Notre collègue sociologue Solange Wajnman propose de former un groupe d'étude – avec ses collègues de l’université de São Paulo (Brésil) – autour des répercussions de la culture kitsch de l'Amérique latine au Brésil, à partir des années 1940 et 50, lorsque la radio, le cinéma et la télévision apportent la culture du drame, de la nostalgie et du mauvais goût. Leur proposition est d'établir une route généalogique de cette culture hispanique au Brésil, jusqu’à nos jours : musiques, telenovelas, mode, etc.  En bref, S. Wajman et ses collègues proposent d’étudier un point de la formation de la culture kitsch au Brésil à partir de l'étude généalogique des médias.
      Cette proposition pourrait s’articuler avec le projet de J.E. « Kitsch et Amériques » et permettrait de développer les liens avec l’université de São Paulo et, éventuellement, d’autres universités brésiliennes et latino-américaines.
    • Jaqueline Zanchetta propose de travailler sur les liens : le kitsch et la musique populaire en Amérique latine (tango, boléro, etc.). Notre collègue nantaise, Emmanuelle Bousquet, spécialiste de l’opéra italien, souhaite aussi collaborer activement avec nous (il serait intéressant d’analyser la représentation de l’Orient dans des opéras tels que Madame Butterfly, par exemple). Une J.E. sera donc consacrée aux liens  « Kitsch et musique, orient-occident ». Cette J.E. pourrait d’ailleurs se faire en collaboration avec les Beaux Arts de Brest ainsi que l’Université et les Beaux Arts de La Plata, en Argentine.
    • Michael Rinn propose une J.E. sur « Kitsch et mauvais goût : de la subjectivité des saveurs ».

    La notion de kitsch sera également explorée dans le domaine gustatif : les goûts alimentaires des autres milieux sociaux (Bourdieu, Hoggart, Santarsiero) et/ou culturels font aussi l’objet de jugements de valeurs (les Européens peuvent considérer la nourriture mexicaine comme « trop » épicée et les pâtisseries orientales « trop » sucrées, etc.). Cette thématique rejoint partiellement celle de Fátima Rodríguez sur les « Herbes ».


    Cette sous-thématique pourra s’appuyer, entre autres, sur les travaux suivants :

    • ARRAULT, Valérie, L’empire du kitsch, Paris, Klincksieck, 2010.
    • ECO, Umberto (sous la direction de), Histoire de la beauté (2002), Paris, Flammarion, 2004.
    • ECO, Umberto, Histoire de la laideur, Paris, Flammarion, 2007.
    • GENIN, Christophe, Kitsch dans l’âme, Vrin, « Matière étrangère », 2010.
    • LEIDUAN, Alessandro, Le problème esthétique chez Umberto Eco. Pour une phénoménologie du kitsch contemporain, Thèse de Doctorat en « langue, littérature et civilisation italiennes », Université « Sophia-Antipolis » de Nice, 2005, inédit.

    Cette deuxième sous-thématique s’articule avec la première.


    Myriam Marrache-Gouraud propose d'organiser une journée sur les objets, notamment la question de l'objet "culte" (kitschissime en général). Donc orienter la réflexion, plutôt que seulement vers l'art proprement dit, dans une direction qui serait celle du phénomène de la collection (ce qui n'exclut pas l'art, bien au contraire, et même hyper contemporain : voir Jeff Koons ou les séries d'objets façon Boltanski). L'idée serait de s'interroger sur la manière (qui varie selon les époques) dont un objet (même banal à première vue et produit en série, donc pas unique du tout) devient un objet "à collectionner", ou tout simplement "à exposer". Chez soi ou dans un musée. Ce qui touche aussi bien à l'art, à la muséologie, qu'à la sociologie (phénomène de société, phénomène de mode, marketing), à l'histoire des collections, voire des sciences, via les cabinets de curiosités (avec la coexistence de ces objets dans un environnement lié à l'histoire naturelle), à l'histoire tout court (puisque les objets ne sauraient être les mêmes d'une époque à l'autre, et varient selon les modes), et pourquoi pas au cinéma si l'on songe aux objets dérivés (on peut faire une collection d'objets Star Wars et celle-ci peut apparaître comme kitsch). Une telle approche permettrait aussi de délimiter, d'une autre façon, ce qu'on appelle "curiosité" et savoir à quel moment et dans quelles conditions cette dénomination croise celle du "kitsch" ou devient "kitsch". Cette J.E. pourrait s’intituler : "L'objet kitsch, de la curiosité à l'objet culte : kitsch et collections".

     

    Cette sous-thématique s’appuiera, entre autres, sur les travaux de :

     

    • BAUDRILLARD, Jean, Le Système des Objets, éditions Gallimard, Paris, 1968.
    • DORFLES, Gillo, Le Kitsch, un catalogue raisonné du mauvais goût, traduit de l'italien par Paul Alexandre, préface de Jean Duvignaud, édition Complexe, Bruxelles, 1978.
    • MARRACHE-GOURAUD, Myriam, « Le ‘magazin du monde’ en Poitou. Cabinets et curieux aux XVIe et XVIIe siècles », dans Curiosité et cabinets de curiosités, dir. D. Moncond’huy, Neuilly, Atlande, 2004, p. 93–108.
    • MARRACHE-GOURAUD, Myriam, « Quand l’aloès se pare des plumes du perroquet. Présentation énigmatique, rareté et curiosité », dans L’énigmatique à la Renais­sance : formes, significations, esthétiques. Actes du col­loque RHR (Lyon, 7–10 sept. 2005), études réunies par A. Tournon, D. Martin, P. Servet, Paris, Honoré Champion, 2008, p. 415–425.
    • MARRACHE-GOURAUD, Myriam, « L’Amérindien et le curieux : rencontre de deux mondes », dans Un continent en partage. Cinq siècles de rencontres entre Amérindiens et Français, dir. M. Augeron et G. Havard, Paris, Les Indes Savantes, 2013, p. 43–52.
    • MOLES, Abraham, Psychologie du Kitsch, l'art du bonheur, Maison Mame, Paris, 1971.

     

    Notre travail autour du Kitsch suscite l’intérêt de nombreux chercheurs et les projets se multiplient. Voici quelques orientations et propositions qui pourraient éventuellement compléter notre programme :
    - Une J.E. « Kitsch et caricature » (ce projet est proposé par Isabelle Le Corff et J.-C. Gardes).
    - Hélène Machinal serait intéressée par une J.E. et/ou une publication sur « Kitsch et fantastique »
    - « Kitsch, camp et subculture gay ». Le genre et la subculture gay sont également des thèmes très pertinents quand on travaille sur le kitsch. Ce sont des thèmes porteurs qui intéressent plusieurs chercheurs de l’UBO. Ce thème peut aussi en traverser d’autres comme le fantastique, la caricature...