5 questions à… Pr Martine Gilard, 1ère brestoise nommée à l’Académie Nationale de Médecine.

Le
Distinction
Pr Martine Gilard
Pr Martine Gilard

Médecin spécialisée en cardiologie interventionnelle et en radiologie au CHU de Brest, mais aussi professeure des universités à l’Université de Bretagne Occidentale, la Pr Martine Gilard a été élu membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine en novembre 2021.

Après avoir suivi son externat à Clermont-Ferrand et à Paris, Martine Gilard arrive à Brest en 1982 pour son internat. Elle obtient son doctorat de médecine en cardiologie en 1986, avant de se spécialiser en radiologie l’année suivante. Elle poursuit son parcours universitaire en 2007 quand elle est nommée professeure de cardiologie, puis, fait original, elle soutient sa thèse de science en 2010.

Au cours de sa carrière Pr Martine Gilard s’est illustrée en cardiologie interventionnelle et en imagerie cardiaque. Grâce à ses travaux menés dès la fin des années 80 sur le scanner coronaire, l’hôpital de Brest est devenu centre référent en imagerie cardiaque. Sa collaboration avec le Pr Boschat a également permis de mettre en place des activités interventionnelles, comme des remplacements de valves aortiques, de façon percutanée, c’est-à-dire sans ouverture chirurgicale du thorax et circulation extra corporelle. Depuis 2010, Pr Gilard gère le registre national des bioprothèses valvulaires aortiques (registre TAVI) et s’intéresse au développement des registres médicaux nationaux. Ces registres permettent de recenser des données médicales sur des populations de patients à l’échelle nationale. Ils sont essentiels pour évaluer et améliorer les pratiques médicales.

Également impliquée dans les sociétés savantes nationales et internationales, Martine Gilard a été élu présidente du groupe de cardiologie interventionnelle en 2007, puis membre de la société européenne de cardiologie en 2009. Présidente de la société française de cardiologie en 2019, elle a été nommée membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine en 2021. Cette nomination vient souligner sa carrière exceptionnelle au service d’une meilleure prise en charge des patients.

1. Pourquoi êtes-vous devenue chercheure en médecine ?

En médecine, on a besoin de données pour avancer dans le traitement quotidien de nos patients. Il y a un caractère aléatoire dans la prise en charge thérapeutique, on ne sait pas toujours très bien quel traitement va être le plus efficace. Il faut aller plus loin et compléter nos connaissances en menant des recherches, c’est pour ça que je suis aussi devenue chercheure en cardiologie interventionnelle.

Au cours de ma carrière, je n’ai fait que de la recherche clinique, pour trouver des applications directes pour les patients, notamment grâce à l’hôpital de Brest qui nous a toujours suivis et nous a ouvert des possibilités.

2. Pourquoi avoir choisi la cardiologie et la radiologie ?

Pour être honnête, je voulais être pédiatre. J’ai donc passé le concours de l’internat de pédiatrie, seule voie à l'époque pour être pédiatre. J’ai été reçue à Brest, mais le poste était déjà occupé, je me suis donc tournée vers mon deuxième choix : la cardiologie. Finalement, cela m’a plu et j’y suis resté.

Ce qui m’intéresse le plus en cardiologie, c’est l’hémodynamique*. À l’époque de mon internat à Brest, le service d’hémodynamique dépendait de la radiologie. J’ai donc passé une deuxième spécialité pour compléter mon cursus.

 

*L’hémodynamique est la science qui étudie la circulation sanguine en mouvement dans le système cardiovasculaire.

3. Que représente pour vous l'Académie Nationale de Médecine ?

Je pense que c’est un aboutissement. Je suis la première médecin brestoise à être nommée à l’Académie Nationale de Médecine, ça permet également de mettre en avant Brest au niveau national.

L’Académie Nationale de Médecine peut paraître comme une vieille institution, mais je me suis aperçue qu’elle a l’attention du gouvernement et donc un rôle à jouer en santé publique. Pour moi, faire partie de l’Académie de Médecine, c’est faire un pas supplémentaire pour avoir un impact concret et positif dans la prise en charge des patients, notamment sur le remboursement des techniques de soins.

4. Quels seront les sujets prioritaires que vous allez porter à l'Académie Nationale de Médecine ?

Dès mon arrivée à l’Académie de Médecine, je me suis saisie d’un sujet fondamental : la baisse du nombre de cardiologue en France. C’est un sujet que je portais déjà quand j’étais présidente de la société française de cardiologie, je me suis battue pour que notre spécialité soit reconnue.

Aujourd’hui en France, l’âge moyen des cardiologues est de 61 ans, beaucoup vont bientôt partir à la retraite. Pourtant, on ne forme plus que 178 internes en cardiologies, contre 220 il y a encore quelques années. On se dirige vers un déficit de cardiologue en France.

Ces dernières années, grâce à une bonne prise en charge des patients, on avait observé une baisse de la mortalité due aux accidents cardiovasculaires, devenant ainsi la deuxième cause de mortalité après les cancers. Or s’il n’y a plus assez de cardiologues, la prise en charge des patients sera impactée et le taux de mortalité va remonter. On se dirige vers un véritable drame.

J’ai donc mis en place très rapidement un groupe de travail pour alerter le gouvernement sur cette problématique et trouver des solutions.

5. Jusqu'à présent, quelle a été pour vous la plus belle réussite de votre carrière ?

À mon avis, ça a été l’automatisation des registres médicaux, je crois beaucoup en l’apport des registres. L’automatisation a permis d’alléger la charge de travail du personnel soignant, c’est une vraie réussite.

Une autre de mes fiertés est la formation des jeunes médecins, et notamment mon successeur, le professeur Romain Didier. C’est une vraie réussite de savoir que le service de cardiologie va perdurer dans la même veine et s’améliorer. J’ai aussi aidé le Pr Didier à intégrer les sociétés nationales et internationales, il va pouvoir continuer à porter la voix de Brest.

La Professeure Martine Gilard était l'invitée de la commission recherche de l'Université de Bretagne Occidentale du mardi 4 octobre. Lors de son intervention, elle a pu présenter aux membres de l'UBO son parcours ainsi que ses travaux en recherche clinique à travers l'exemple de la cardiologie.